Scène VII.

[172] Les Précédents, Anna.


ANNA, à part. Voici bien le passage mystérieux qui conduit dans cette salle;[172] mais, hélas! je n'ai encore rien trouvé. Avançant la tète. Que vois-je? Gaveston! Écoutons, et ne nous montrons pas. Elle referme le panneau et disparaît.

GAVESTON, redescendant le théâtre. Eh bien! qu'avez-vous à m'apprendre?

MAC-IRTON. D'importantes nouvelles! Il faut vous hâter, ou vous êtes perdu: le fils de vos anciens maîtres, Julien, comte d'Avenel, a reparu en Angleterre.

GAVESTON. Qui vous l'a annoncé?

MAC-IRTON. Une lettre de Londres, et des titres authentiques que nous ne pouvons révoquer en doute. Vous savez qu'il y a une douzaine d'années, Julien d'Avenel fut confié à un serviteur de son père, Duncan, un Irlandais que vous connaissez.

GAVESTON. Oui. Après?

MAC-IRTON. On lui avait remis une somme considérable pour conduire cet enfant en France et l'y faire élever secrètement; mais, loin de suivre ses instructions, Duncan s'était embarqué pour l'Amérique, et s'était approprié cette somme.

GAVESTON. Eh bien?

MAC-IRTON. Eh bien! ce Duncan, de retour en Angleterre, a signé, il y a quinze jours, dans l'hospice où il est mort, une déclaration devant témoins portant que Julien, comte d'Avenel, son ancien élève, servait maintenant dans un régiment d'infanterie. Gaveston. Eh bien! qu'importe?

MAC-IRTON. Comment, qu'importe? Il sert sous le nom de Georges Brown.

GAVESTON. O ciel!

MAC-IRTON. Comprenez-vous maintenant? c'est lui qui, ce matin, a surenchéri, et vous devinez dans quelle intention?[173]

GAVESTON. Non, vous vous trompez; rien n'est encore désespéré, car il ignore et son nom et sa naissance.

MAC-IRTON. Il se pourrait?

GAVESTON. Mais il ne peut pas payer. Il n'a rien, aucunes ressources: il me l'a avoue lui-même; et quand je serai propriétaire du château et du titre de comte d'Avenel, peu m'importe alors que Georges Brown soit reconnu pour un descendant de l'ancienne famille: je le lui apprendrai moi-même s'il le faut.

MAC-IRTON. Vous avez raison.

GAVESTON. L'important est de se presser, venez tout disposer. Ils sortent sur la ritournelle de l'air suivant.


Quelle:
Boieldieu, François-Adrien: La dame blanche, in: Eugène Scribe: Théatre de Eugène Scribe de l'Académie Française, V,1: Opéras-comiques, Paris 1856, S. 172-174.
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